Assemblée Générale 2022

Le conseil d'administration de l'association " LES ENFANTS de TCHERNOBYL " avait invité ses membres à l'Assemblée Générale 2022, le samedi 12 mars 2022 à 14H30
à la salle des fêtes de Grussenheim (Haut-Rhin).
L'actualité et la présence de plusieurs de nos interprètes réfugiées en France ont fait de cette 29ème Assemblée Générale la plus émouvante depuis la création de l'Association en 1993.


Photo Assemblée Générale 2022

GUERRE EN UKRAINE
« Si je n’avais pas deux enfants, je serais encore à Kiev »


Assemblée générale tout sauf « ordinaire », ce samedi à Grussenheim, pour l’association "Les enfants de Tchernobyl" qui œuvre en Ukraine depuis 1993. Plusieurs interprètes accueillies en urgence depuis quelques jours par des adhérents de l’association ont livré des témoignages poignants.

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Natalia n’avait encore que 11 ans quand elle a découvert l’Alsace grâce à l’association Les Enfants de Tchernobyl. De vraies vacances d’été passées au loin; loin en tout cas de la vaste zone interdite qui entoure l’ex-centrale nucléaire depuis la catastrophe de 1986. Les années ont passé, la fillette est régulièrement revenue en France, elle en a de mieux en mieux parlé la langue, elle a grandi : Natalia, 36 ans, est finalement devenue l’une des interprètes attitrées de l’association, ce qui n’explique pas sa présence, ce samedi après-midi dans le hall d’entrée du foyer communal de Grussenheim, sa fille Zoya (4 ans) nichée dans le cou. C’est jour d’AG pour Les Enfants de Tchernobyl, certes, mais Natalia réside à Kiev. Résidait, plutôt.

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« Le 24 février au matin, comme tout le monde à Kiev, on a été réveillé par d’énormes bruits explosions. On a tout de suite compris. Mon mari a insisté pour qu’on parte dès le lendemain, Zoya, ma sœur Ania (30 ans) et moi : "Il faut que vous partiez maintenant. Après ça ne sera peut-être plus possible". » D’un sourire timide, la jeune femme abrège son récit. À la tribune, le président fondateur de l’association, Thierry Meyer, semble hésiter sur la façon d’ouvrir l’AG. D’évidence, elle ne pourra rien avoir d’ordinaire. Le rapport moral annuel ? « Quand je l’ai écrit le 29 janvier, confie Thierry Meyer, j’étais alors loin de me douter que nous en serions aujourd’hui au 17ème jour de guerre. Le drapeau ukrainien que vous voyez devant moi, il m’a été offert sur la place Maïdan, en 2014 ». La voix chevrote soudain, sous le coup de l’émotion : « Voilà, ça aura duré huit ans... Mon rapport moral, donc, c’est ça : il faut qu’on continue d’aider. »

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Retourner sur place dès que possible

Aider, mais comment ? Inutile de détailler le budget prévisionnel 2022, désormais « obsolète ». L’accueil d’enfants prévu en juillet prochain ? Annulé, « par la force des choses ». Faut-il lancer des collectes de vivres et de médicaments, organiser l’accueil de réfugiés ? Ce serait problématique à de nombreux d’égards, expose encore le président. « Collecter, c’est bien, mais le problème numéro 1, c’est la distribution. Aucune route ukrainienne n’est plus sûre. C’est la guerre ! ». Dans le même ordre d’idée, « la préfecture nous a fortement déconseillé d’accueillir des personnes avec qui nous n’aurions pas de lien. Déjà, des filières de passage payantes se mettent en place. On va donc se concentrer sur "la grande famille" de l’association : les quelque 1 500 enfants accueillis au fil des ans, leurs familles, leurs professeurs... Ainsi que les 19 villages de la région de Tchernobyl qu’on accompagne depuis 1993. Ce sont juste des lignes directrices, des "pointillés" parce que la guerre continue de se développer, mais le propos, c’est ça : ne laisser tomber personne de la "famille" – et dès que ce sera possible, on retournera aussi sur place. » La salle approuve comme un seul homme.

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La partie « statutaire » – si l’on peut dire – de l’AG étant achevée, le président invite une demi-douzaine de jeunes femmes à le rejoindre au pied de la tribune. Toutes sont interprètes de l’association. Toutes sont arrivées en France, cahin-caha, ces derniers jours. Timides, émues, elles tiennent à livrer leurs témoignages, en luttant contre les larmes ; à remercier de l’accueil alsacien, aussi. « Ma vie se divise désormais en deux, résume Mariana, avant et après le 24 février. Le 23 au soir, on s’est couché avec mon mari après avoir discuté des prochaines vacances d’été, et s’être même un peu disputé à propos de la destination... Et puis le 24 au matin, ce sont des explosions qui nous ont réveillés... La guerre. » « Si je n’avais pas deux enfants, je serais encore à Kiev, pour résister », murmure Olga. Revoici enfin Natalia, qui relate son brusque exode sur des routes bondées : « On a mis trois jours pour arriver dans l’ouest du pays, au lieu de sept ou huit heures en temps normal. » Jeudi soir, elle, sa fille Zoya et sa sœur Ania ont enfin pu entrer en Hongrie. Un vol Budapest/Bâle-Mulhouse plus tard, elles se retrouvaient accueillies chez un membre de l’association. En sécurité, mais déchirées. « En se réveillant ce matin, Zoya m’a dit qu’elle était contente d’être dans un endroit où il n’y a ni bruits d’explosion ni de sirène », glisse Natalia, avant de conclure tout bas : « Je suis partie pour elle, mais mon cœur reste en Ukraine. »

Emmanuel DELAHAYE / DNA / Page région / Dimanche 13 mars 2022


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13 mars 2022
« Si je n’avais pas deux enfants, je serais encore à Kiev »

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